15 juin 2010

Parinacota (5-9 Juin)

Dernière expédition pour moi avant un retour en France anticipé, l’ascension du volcan Parinacota. Un superbe volcan culminant à 6340m. De quoi finir en beauté ces 5 mois en Amérique du sud.
A peine de retour de l’Illampu, nous partons donc pour une expédition des plus incertaines. En effet, nous décidons de le faire en complète autonomie et devons donc gérer toute la logistique : transport, matos, bouffe, acclimatation, … le tout dans une région reculée, réputée très froide, désertique et donc sans eau disponible et pour notre premier sommet à plus de 6000m.
Départ de la Paz avec des sacs déjà bien chargés. Nous nous trimbalons pas mal de bouffe, du matos pour le froid, crampons et grosses chaussures. Premier objectif : arriver à Sajama. Deux heures de bus de ligne jusqu’à Patacamaya, petit village reculé sur la route d’Oruro puis 4h d’attente pour prendre l’unique minibus journalier en direction de Sajama. Nous rencontrons deux français bien sympa venant ici pour gravir le volcan Sajama, plus haut sommet bolivien à plus de 6500m. Sommet que nous avons écarté car un peu trop technique pour le faire en autonomie. D’autant qu’en plus d’être notre premier 6000, ce sera aussi la première en crampons pour henri !

Sajama est un petit village au milieu de l’altiplano désertique bolivien. Il n’y a à peu près rien. Le village parait mort. Les deux grandes places sont désespérément vides et seuls 1 ou 2 boutiques et quelques hôtels nous font dire que le village est en vie. On est à 4200m et le soleil à peine couché, il fait déjà bien froid. On nous a prévenu, si il le vent est un peu trop fort, ce n’est même pas la peine de tenter l’ascension. On serait congelé comme des glaçons. Les prévisions sont a priori bonnes et nous comptons sur notre bonne étoile, qui nous accompagne depuis le début du voyage. Et sur nos paires de moufles.
Pour la première nuit, nous campons dans le village, histoire que la transition avec la nuit prochaine, à 5100m et en plein vent, ne soit pas trop violente. Sans complexe puisque le village est mort, nous plantons la tente dans le seul endroit abrité du village : l’ancienne église, en plein milieu du village. Tranquillement installés entre deux arcs-boutants, nous passons une nuit des plus agréables, dans un de nos spots les plus charmants. Le lendemain, le lever de soleil sur le volcan, avec l’église et un lama en premier plan est mémorable.

Nous chargeons nos 2 ânes de nos gros sacs pleins et de 24L d’eau. Comme d’habitude, ayant peur de manquer, nous avons prévu large. D’autant plus que nous n’excluons pas de passer plus de temps que prévu au camp d’altitude en cas de problème d’acclimatation.
5h de marche avec les ânes et plus de 20 km enquillés sur la grande plaine qui mène au pied du volcan. Nous faisons nos premiers pas dans ce sable volcanique noir des plus désagréables. Heureusement que nous ne portons rien… A part dans la grande plaine où les immenses troupeaux de Lamas et d’Alpagas se la coulent douce, nous ne croisons aucune forme de végétation et pas une source. Plus on avance, plus l’on s’isole. Une fois au camp de base, les ânes nous laissent et nous prenons le relais. Nous laissons un peu de bouffe et d’eau pour le retour et partons pour 2h de montée avec des sacs énormes. Nous avons de quoi soutenir un siège la haut.
Le camp d’altitude est surexposé au vent et plantons la tente à l’abri d’un gros rocher et de quelques petits murets. C’est serré mais ca passe. Tout au long de la marche d’approche, sur plus de 25 km, le volcan n’a pas l’air de s’être rapproché tant que ça. Il est toujours aussi imposant et impressionnant. On est autour de 5000m et il faudra donc monter prés de 1400m demain. Chaud chaud chaud ! Soirée très froide à essayer de se faire à manger. Manque de pot, le tout nouveau réchaud à essence que nous avons pour l’occasion refuse de fonctionner. Le froid, l’altitude et la mauvaise qualité de l’essence bloque tout le système. Malgrès moultes tentatives de réparation, nous nous contentons de 2 sardines chacun et d’un œuf. Maigre repas avant une ascension…
Départ le lendemain à 5h30 du matin. Inutile de partir trop tôt. La montée est bien balisée et il n’y a pas de glacier. Partir tôt ne servirait qu’à avoir encore plus froid. Commencent alors 4 longues heures de montée sur ce fameux sable volcanique. Une horreur. Pas bien réveillés, nous l’enchainons tout de même assez bien. Nous montons relativement à un bon rythme. Je dis bien relativement car l’altitude nous oblige à beaucoup de petites pauses et nous impose une vitesse de croisière qui peut paraitre ridicule (voir vidéo à suivre). Pourtant, je vous l’assure, nous sommes à fond.

Nous arrivons enfin sur la neige. On se dit que nous avons fait le plus dur. En effet, vu de loin, la partie en cailloux semble facilement deux fois plus longue que la partie en neige. Impression confirmée par la proximité visuelle du sommet.
Mais, et nous le savons depuis l’Osorno, un volcan est extrêmement trompeur. L’absence de perspectives due à une pente parfaitement rectiligne et à l’absence d’autres sommets pouvant servir de point de repères fausse complètement la réalité. Nous marchons près de 4h sur la neige avec l’impression continuelle d’arriver dans 10 min… C’est long et monotone. On a l’impression de refaire le même virage éternellement, de ne pas avancer. Un vrai calvaire. D’autant plus que l’altitude commence à se faire sérieusement sentir. Le pas est extrêmement lent, Henri est tout blanc et a des grosses envies d’en poser une. C’est là qu’il faut être fort et ne pas craquer.
Alors qu’Henri est à la limite d’arrêter et qu'Hugo et moi faisons pas les malins, on apperçoit le cratère. Tout de suite, ca redonne le moral, ça fait oublier la fatigue et ça donne le sourire. Le cratère est pour nous trois un des trucs les plus impressionnants que l’on ait vu en montagne. Un trou gigantesque de plus de 300m aux parois plus que verticales. Trouver ca posé là-haut après 8h d’effort est une sacré belle récompense ! Cela fait oublier toute la fatigue de la montée.

Le sommet est 40m plus haut. Hugo et Henri n’iront pas. Bien fatigués et comme des gamins devant le cratère, ils préfèrent se reposer et profiter de la vue. Cette ascension nous aura fait passé par beaucoup d’états différents, de l’excitation à l’extrême fatigue, de l’impression d’y arriver facilement à l’envie de faire demi-tour. L’arrivée au cratère n’en ai que plus belle.
La descente jusqu’au camp d’altitude est expédiée en deux petites heures. Sur la neige puis dans le sable ça avance plutôt bien. C’est un peu frustrant et désolant de se dire qu’on a mis 8h à monter ce que l’on descend en deux… Petite sieste puis on enchaine la descente jusqu’au camp de base. Nous y attendent des restes de bouffe et surtout un reste d’alcool qui devrait nous permettre de faire fonctionner le réchaud à cannette. Gros gros pétage de bide en perspective.

Le lendemain matin, longue longue longue redescente jusqu’à Sajama. La traversée du plateau est interminable. D’autant plus que ce coup ci, les ânes ne sont pas la pour nous aider et les sacs pèsent toujours leurs poids, l’eau en moins, heureusement. Quatre heures de marche fastidieuses nous permettent d’arriver au village à midi et donc d’enchainer sur ce dont nous rêvons depuis le début : une petite baignade dans les sources chaudes.
Seul petit problème, elles sont annoncées à 1h30 de marche. Nous nous motivons quand même, trop contents de pouvoir noyer nos courbatures dans l’eau chaude. Au final, il nous faudra plus de 2h30 et l’aide de la française rencontrée dans le bus pour les trouver, mais quel bonheur ! Des sources bouillantes, en pleine nature, avec vue direct sur notre volcan… magique. L’heure et demi de marche de retour passe tout seul.

Nous voila de retour à La Paz, bien contents d’avoir mener à bien cette expédition dont le succés n’était pas garanti à l’avance. Nous avons une nouvelle fois eu de la chance avec le temps puisque le vent était quasi inexistant pendant toute la montée. Cela nous a bien aidés. C’était pour moi une fin en apothéose. Cette aventure a regroupé tous les ingrédients qu’il fallait : de l’inconnu, du défi, une première à 6000, deux partenaires au top avec qui je voulais absolument faire un beau sommet, pas de touristes ou d’agence pour nous embêter, des paysages fabuleux, …
Bref, nous rentrons à La Paz le sourire aux lèvres. L’aventure continue vers le lac Titicaca pour Henri et Hugo. Quant à moi, me voilà de retour en France après un passage éclair à Rio de Janeiro, ville qui aura marqué le début et la fin de ces 5 mois de voyage.

Pilou

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